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Les grands malheurs

Lecture revisitée et première contribution au Challenge 14 / 18 (Livraddict) dont vous trouverez le topic ci-dessous 

Quatrième de couverture, mot de l'auteur :

 

Je suis un vieil homme habité par la guerre. Chaque fois que j'ai cru l'avoir distancée, un évènement est survenu qui l'a lancée à mes trousses. Vieille bête hargneuse, elle me suit à la trace et ne cesse de grogner à mes pieds. Elle habite ma vie depuis mon enfance et c'es sans  illusion que je me remets à parler d'elle. On n'apprivoise pas la guerre. Même lorsque l'on croit l'avoir muselée et enfermée dans un recoin muet de la mémoire, elle demeure en éveil. un rien la fouaille et la pousse à mordre à nouveau.

Si j'ai décidé de raconter la vie de Xavier Roissard c'est que ce vieux vigneron m'est apparu comme un frère. C'est qu'il est un homme parmi les hommes, douloureux et chargé d'un énorme fardeau, comme des millions d'êtres qui n'ont pas mérité que tant de malheurs s'abattent sur eux et sur leurs proches.

 

Avis, critique et résumé :

Premier ouvrage de cet auteur, mort, il y a peu, que j'ai découvert avec intérêt. Ce livre recoupe plusieurs thématiques : petites histoires de vie au cœur de la grande Histoire du XX ème siècle sur une période couvrant 1914 à 1945, travail quasi sociologique sur les éléments déclencheurs de la seconde guerre mondiale, chroniques viticoles et paysannes et violent plaidoyer pacifique.

On suit avec intérêt trois générations de viticulteurs Jurassien marqués profondément par les deux guerres mondiales et par un amour effréné du travail de la vigne et des chevaux, ces derniers étant pratiquement préférés au genre humain.

Ce livre commence par l'évocation de la famille Dufrène, petit viticulteur, le drame s'installe avec le départ pour le front du fils unique pour le front en 1914, laissant sa mère et sœur (Noémie) seules à cultiver leur vigne. Une conduite élogieuse dans un premier temps et puis face à la négligence et à la bêtise des généraux et l'inutilité de la guerre, par volonté de sauver son camarade promis au peloton d'exécution pour avoir trop critiqué ses officiers incompétents, il se laisse capturer par les allemands qui l'envoient travailler pour eux en tant que prisonnier dans une ferme allemande. Son destin se lie alors à la fille de la famille allemande pour laquelle il travaille, alors que les siens s'ont obligées de vivre sans lui, sous la haine des voisins le jugeant comme un déserteur. Ayant mis cette jeune allemande enceinte, il l'épouse mais sa belle famille en la personne de son beau frère les oblige alors de quitter la terre pour travailler à la mine chez les usines de la famille Krups.

On va alors se consacrer uniquement à suivre Noémie Dufrène qui épouse un grand blessé de la guerre (gazé et boiteux),  Roissard, viticulteur reconnu de vin jaune. Dans la haine des Allemands, la détestation de la guerre, l'amitié des autres poilus survivants et dans le culte du Maréchal Pétain, il va alors se renfermer et obliger sa femme puis son fils Xavier à ne rien espérer de bon des hommes politiques, du Front Populaire et des gens de gauche. D'abord fidèle à son père, et  viticulteur passionné, la montée en puissance des partisans et de la seconde guerre mondiale vont tout bouleversés. Xavier va, peu à peu, se détacher plus ou moins violemment des valeurs du passé défendus par son père et des valeurs de plus en plus réactionnaires et fascistes du modèle défendu par le Maréchal Pétain. Nourri par un instituteur voulant éclairer ses élèves sur l'inutilité de la guerre, son cousin lyonnais de gauche, ses copains de 17 ans, par le désir de rencontrer ce cousin allemand qu'il ne connaît pas, lorsque la seconde guerre mondiale succède à la guerre d'Espagne tout est bouleversé dans l'esprit de Xavier et la crise monte et explose entre lui et son père, Légionnaire de la Croix de Feu et suppôt de Pétain. Il va quitter ses parents, sa chère terre de vigne et son cheval afin de saisir son destin vers la résistance. Son destin et celui de ses parents va alors devenir des plus funestes.

Roman témoignage, chroniques quotidiennes de la vie des français d'origine rurale de 1914 à 1945, étude de la montée en puissance d'un certain esprit de revanche et stupidité de toute guerre, c'est un plaidoyer profondément humain et pacifique de Bernard Clavel. La lecture de ce livre devrait être obligatoire pour tous ces va-t'en guerre qui fleurissent  régulièrement, et les leçons devraient en être tirées.

Très belle écriture, éloge puissant du travail de la terre et du respect des valeurs humaines et humanitaires ainsi que la noblesse de la race équidé

Tag(s) : #Challenge Des Livres au lieu des armes
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